Pierre-Joseph Porion

Une notice biographique
Philippe Brindet, 29 janvier 2011, 05.02.2011, 11.02.2015

Enfance et formation de Porion

Biographie abrégée :

Pierre-Joseph Porion est né à Thièvres en 1743 de Jean-Adrien Porion et de Marguerite-Thérèse Haudouart. Il fut élève au collège des Oratoriens d'Arras. A cette époque, les Oratoriens d'Arras avaient à l'élève les deux Robespierre, les deux Carnot et Joseph Le Bon. Porion est entré plus tard, jeune encore dans la congrégation de l'Oratoire. Nommé curé de Saint-Nicolas-sur-les-Fossés à Arras par Mgr de Conzié, évêque d'Arras, avant la Révolution. Il est ensuite élu évêque constitutionel le 29 mars 1791. Il est sacré le 10 avril 1791 par Talleyrand-Périgord à Paris. Il se déprêtrise le 22 novembre 1793, se marie et décède le 20 mars 1830.

Quelques détails sur la vie de Porion

Jeune prêtre dont les talents étaient appréciés de ses supérieurs ecclésiastiques, il avait été d'abord secrétaire de Christophe de Beaumont, archevêque de Paris. Il avait ensuite été nommé professeur au collège de La Flèche. A une date que nous n'avons pas retrouvée, il a été régent de philosophie au collège d'Arras. Mgr de Conzié lui donne alors l'une des cures les plus importantes de sa ville épiscopale (Deramecourt, p. 162, op. cité). La Révolution le trouve donc curé de Saint-Nicolas-sur-des-Fossés. Et le 23 janvier 1791, date limite pour prononcer le serment à la Constitution civile du Clergé, Porion est le seul prêtre avec Herbet, vicaire de Saint-Aubert, parmi le clergé d'Arras, à prêter ce serment (Deramecourt, p.107 op. cité ; Chavanon p. 214, op. cité). Il avait quarante-neuf ans.

Porion, évêque constitutionel du Pas-de-Calais

Avant la Constitution civile du clergé, le diocèse de Saint-Omer était administré par Mgr Alexandre de Bruyère Chalabre.

Nous sommes contraint à une courte digression à ce propos. Il existe aussi un second évêque Henri de Bruyère-Chalabre, né en 1731 à Chalabre. Ce Chalabre de Saint-Fons fut un évêque mondain qui, d'après les témoignages retenus, semble n'avoir aucune activité épiscopale à Saint-Fons ou ailleurs. Par contre, Gérard Cholvy, nous apprend une chose intéressante :

En 1789, 27 Vénérables de loges, dont cinq à Paris, sont du clergé. Dans le territoire actuel de l’Hérault, où les loges sont très nombreuses (18 à Montpellier, mais encore à Lunel, Sète, Lodève, Pézenas, Gignac, Agde, Saint-Chinian) la loge Liberté, fondée à Saint-Chinian, a comme premier des membres honoraires, en 1785, l’évêque du diocèse (Saint-Pons) Mgr de Bruyères-Chalabre et, comme second membre l’évêque de Saint-Omer, autre Bruyères-Chalabre.
Source : G. Cholvy, op. cité
On comprend l'extrême difficulté de partager les responsabilités des trahisons et des menées subversives dans l'Eglise elle-même.

Prudemment parti "aux eaux d'Aix", Mgr "de Saint-Omer" fut rejoint par un mandement porté par Guffroy. Guffroy, autre digression, est un curieux personnage. Fidèle de Robespierre, député aux Etats-Généraux, il manoeuvre avec intelligence. Il deviendra un soutien de Joseph Le Bon avant de devenir son ennemi déclaré, étant près de le faire tomber plusieurs fois.

Mgr de Bruyère refusa le 17 juin 1790 de revenir à son poste comme évêque constitutionnel, tout comme Mgr de Conzié, évêque d'Arras. Il fallut organiser une élection dans le Département du Pas-de-Calais, selon les règles établies par la Constitution civile du clergé de façon à regrouper plusieurs diocèses, selon le découpage départemental de la Constitution civile.

Les administrateurs du département convoquèrent esclusivement des électeurs au républicanisme assuré et des candidats de la même force. Mais, craignant d'être déçus, ils accompagnèrent leur convocation d'une préparation républicaine et laïque des plus insistantes dans laquelle on peut lire :
« Citoyens, on calomnie nos législateurs qui sont les sauveurs de l'Etat ; on en fait des parjures envers Dieu, les tyrans de la religion, les usurpateurs du sacerdoce.

« Citoyens, on vous dit que le catholicisme, ce précieux héritage que vous a laissé l'antique croyance de vos pères, va devenir la proie d'une odieuse et sacrilège politique ; que vos temples vont être renversés, vos prêtres persécutés et réduits à la plus affreuse misère, que l'impiété et l'hérésie vont s'établir autour de vous, sur la ruine d'une religion sainte et sublime dont vous deviendrez les martyrs; on sollicite vos coeurs à la révolte et, cent fois plus cruels et plus impies que les prétendus tyrans dont ils vous menacent, les impies corrupteurs de votre civisme voudraient vous rendre aussi féroces et aussi sanguinaires que le Dieu au nom duquel ils osent ainsi vous parler était doux et pacifique.

« Serait-ce donc ainsi, citoyens, que ce Dieu voudrait que vous défendissiez son culte? S'est-il donc déclaré l'ennemi d'une Révolution dont il a, au contraire, opéré lui-même tous les miracles ; et, si vous ne pouvez méconnaître son ouvrage dans le bonheur avec lequel la destinée de cet empire se joue de tous les complots des méchants, irez-vous lutter contre sa Providence pour empêcher l'accomplissoment de ses éternels décrets ? Loin que vous puissiez craindre quelque danger pour une religion que vos représentants n'abandonneront jamais, vous ne devez voir dans leurs précieuses réformes que sa restauration et les moyens de lui rendre sa première splendeur.

« Cette religion serait-elle donc si offensée que des richesses, (la source du relâchement et de la corruption), qui ont été accumulées par ses ministres, soient devenues le remède des plus grands maux de l'Etat ; lorsqu'ayant toujours été pauvre dans son auteur, elle n'a dû ses plus beaux siècles qu'à la pauvreté et au désintéressement de ses premiers pasteurs ?

« Nos prêtres, nos évêques seront-ils moins dignes de cette même religion et moins respectables au yeux du peuple, lorsque, dégagés du luxe corrupteur, de cette traîtreuse opulence qui défiguraient sans cesse leurs vertus, ils auront repris ce noble et imposant caractère de la simplicité évangélique, cette ressemblance plus parfaite avec le divin législateur ? Ne seront-ils pas à l'abri de tous les besoins par le sort que la sollicitude nationale a su leur ménager sur les premières ressources du trésor public ? Le culte enfin sera-t-il abandonné, puisqu'il a été également pourvu à sa décence et que la sainteté des ministres et la piété des fidèles en seront toujours le plus bel ornement?

« Les mesures nouvelles, les circonscriptions diocésaines, les élections des évêques et des curés ne sont que des lois de police extérieure ou n'ont pour but que de remettre le choix des ministres de la religion au plus digne organe, à celui que l'Écriture sainte appelle la voix de Dieu, la voix du peuple qui proclama jadis les Chrysostôme, les Ambroise et les Augustin.

« Cette voix ne saurait-elle aujourd'hui être bien inspirée ?

« Citoyens, qui chérissez si justement la foi de vos pères, elle vous est gardée et plus sainte et plus pure par ces mêmes lois que l'erreur superstitieuse et l'orgueilleux fanatisme vous dépeignent comme sacrilèges. Déjà, dans tout le reste de la France, vos frères s'applaudissent d'avoir usé du bienfait de la Constitution, pour placer à leur tête ces hommes désignés depuis longtemps par l'estime et la confiance publique, mais qu'un profane abus avait toujours repoussés des premières places. »

Source : p. 152, Deramecourt, op. cité
Le 26 mars 1791, 497 laïcs se rassemblèrent à l'église Saint-Nicolas-sur-des-Fossés pour élire un évêque dirigeant plus de 150.000 fidèles qui n'ont pas un mot à dire à ce sujet. On note une fois de plus l'extrême faiblesse numérique du collège électoral. Cette faiblesse ainsi que le choix résolumment partisan des électeurs est caractéristique de la plupart des manifestations de la démocratie révolutionnaire. L'église Saint-Nicolas-sur-des-Fossés était desservie par Porion lui-même. Porion célèbre donc la messe. Après la messe, se tient l'élection de Porion. On retrouve Spitallier, Oratorien du Collège d'Arras comme Porion, élu secrétaire du troisième bureau de l'assemblée électorale. (p. 154, Deramecourt, op. cité).

On raconte que cette élection fut longue parce que plusieurs candidats obtinrent tout d'abord plus de voix que Porion. Ils furent contraints à renoncer à leur élection. Enfin, Porion fut élu malgré ses dénégations à la tribune. Le président de l'assemblée électorale était Carnot, le frère du futur organisateur de la victoire, tous intimes de Robespierre. Il monta à son tour à la tribune pour contraindre publiquement Porion d'accepter.

Porion finit par accepter, ce qui montre que l'évêque constitutionnel était entièrement dans une entente entre le club jacobin de Carnot et les Oratoriens d'Arras.

Pour finir, l'assemblée électorale fut clôturée par Carnot qui harangua Porion avec le ridicule verbiage de l'époque révolutionnaire :

« Il ne vous eût pas suffit Monsieur, d'avoir une piété sincère et éclairée pour réunir en votre faveur le voeu de vos concitoyens, il vous fallait encore un courage capable de résister à une vaine terreur, à des embûches de toute espèce qu'on n'a cessé de vous tendre, à des préjugés enracinés par votre éducation; et, plus que tout cela encore, à l'espèce de mépris que les ennemis du bien public ont cherché à verser sur vous. Vous avez apprécié ces manoeuvres à leur juste valeur ; vous n'avez été guidé dans votre jugement que par vos principes et votre ardent amour pour la religion et pour la patrie. Ces qualités vous ont mérité d'être choisi pour le pasteur d'un troupeau nombreux, de tout temps attaché à la religion de ses pères ; votre conduite passée, Monsieur, lui est un sûr garant de votre conduite future et du soin que vous prendrez de conserver le dépôt précieux que cette assemblée vous confie. »
Source : p. 164, Deramecourt, op. cité
Porion, devenu évêque, nomme M. Gabriel-François Dupont, doyen de Marquise, son dernier concurrent, son premier vicaire épiscopal. On voit bien que tous s'étaient entendus pour que Porion soit élu évêque et Porion, en remerciement, nomme Dupont vicaire.

Le lendemain, Porion est installé dans sa cathédrale par les autorités civiles et se voit gratifié d'un nouveau discours de Carnot, le cadet. Ce discours souligne l'alliance de la religion et de la politique. Nous pensons que ce discours de Carnot cadet est extrêmement important pour comprendre la "religion républicaine" et sa tentative d'annexer le catholicisme pendant un temps.

« Citoyens,

la solennité qui vous rassemble est une des plus imposantes dont les fastes du monde fassent mention. L'accord et l'intelligence du sacerdoce et de l'empire ont été de tout temps regardés, avec raison, comme la sauvegarde du bonheur, de la liberté et de la prospérité des peuples ; la religion dans laquelle nous avons le bonheur de vivre est de toutes les religions la plus favorable à procurer ces avantages; son divin auteur nous a annoncé que son royaume n'était point de ce monde et, ce qui prouverait seul sa mission divine, s'il en était besoin, c'est la facilité avec laquelle cette religion se plie à toutes les formes de gouvernement; c'est le précepte religieux si connu et si souvent méprisé, que nous a donné le souverain législateur : rendez à César ce qui est à César. »

Source : Deramecourt, op. cité p. 159.
Porion est exactement une potiche qui sert d'écran à la seule "religion" qui compte en matière de république : la soumission intérieure totale des citoyens à l'ordre républicain. Cette soumission intérieure est l'objectif de Porion. Il le sait et fera de son mieux pour que les catholiques citoyens soient soumis à l'Etat jacobin.

Porion est en parfaite entente avec les autorités révolutionnaires. Ainsi, le 19 avril 1791, la municipalité de Calais lui envoie une terrible déclaration d'amour républicain qui résonne comme la confession d'une nouvelle religion :

« Calais, 19 avril 1791.

La nouvelle de votre élection à l'évêché du département du Pas- de-Calais, celle de votre installation à St-Omer, nous donnent bien plus que jamais l'occasion de nous féliciter des moyens que la Providence emploie pour, en régénérant cet Empire, y faire régner la religion de nos pères et toute la pureté de la primitive Église. «Vos vertus et vos talents nous sont une preuve qu'elle nous a visiblement protégés dans le choix que l'on vient de faire de votre personne. Ce choix nous est un sûr garant du bienfait inestimable de la paix qu'elle va répandre sur nous, et la paix est toujours certaine, lorsque des ministres comme vous la prêchent par leurs discours et par leurs exemples. «Notre foi est inébranlable, comme les vérités qu'elle enseigne, et notre attachement à la religion catholique fait notre plus douce consolation. « Venez, Monsieur l'Evèque, venez parmi nous aussitôt que les fonctions pénibles et glorieuses de votre ministère vous le permettront. Recevez d'avance l'assurance, etc. »

Source : p. 222, Deramecourt, op. cité
On note que la municipalité de Calais caractérise la nouvelle "religion" fondée par la Constitution civile du clergé par trois invocations :
  • d'une "primitive église" et de la religion de nos pères" ;
  • de la paix ;et
  • d'une foi inébranlable.
L'invocation de la "primitive église" permet d'interdire toute contestation de l'idéologie de la nouvelle église constitutionnelle : elle est pure, puisque primitive. La "paix" est, avec ses variantes, le bonheur et l'entente sociale, une chose qu'il n'est pas facile de ne pas désirer, à moins de vouloir passer pour un asocial. La "foi inébranlable" est comme l'étendard de l'auto-satisfaction. Ces trois "invocations" se retrouvent toujours dans les formes contemporaines des pires errements du catholicisme. La formulation est tellement "correcte" qu'on se demande si elle n'a pas été rédigée par Porion lui-même à la requête de la municipalité. On peut penser que Spitallierétait capable de ce genre de manoeuvre.

L'épiscopat constitutionnel de Porion

Porion va se livrer pendant la courte durée de son "épiscopat" à trois missions :

  • l'administration des fonctionnaires publics que sont les prêtres constitutionnels ;
  • le soutien pratique des patriotes par l'encadrement des catholiques citoyens et l'élimination des catholiques non-citoyens ; et
  • la diffusion de l'iédologie jacobine.
. Son administration de son diocèse constitutionnel est difficile. Nomination des grand-vicaires, organisation des élections des curés constitutionnels, etc. En fait, ses menées anti-religieuses sont nombreuses et concertées avec les autres Oratoriens comme Spitallier.

Le 1er mai 1791, Porion adresse à tous ses fonctionnaires eclésiastiques une circulaire à lire obligatoirement au prêche du premier dimanche suivant sa réception. Il se désigne de la façon suivante :

Pierre-Joseph PORION, par la Miséricorde Divine et la libre Election du Peuple, dans la Communion du Saint-Siège Apostolique, Evêque du Département du Pas-de-Calais, ..."
Source : Lettre Pastorale de M. L'Evêque du Département du Pas-de-Calais, Lille 1791.
On ne sait si la Miséricorde y serait quelque chose, mais ce qui est certain, c'est que le Peuple était limité à 467 votants et que le Saint-Siège a condamné son élection. Mais, tout cela n'était qu'un galimatias et Porion termine sa Lettre Pastorale par une exhortation qui dut paraître étonnante aux rares auditeurs des prêches de dimanche :
Bénissez-la cette Révolution !
Porion tient à se présenter comme l'évangélisateur de la nouvelle religion qui a nom "Révolution". Et il ne le fait pas de lui-même, mais parce qu'il personnalise le mouvement Oratorien révolutionnaire.

La municipalité de Calais est très attachée à servir d'"Inquisition" à Porion. Ainsi écrit-elle au curé de Calais, le 7 mai 1791 la lettre suivante qui est un sommet de contrôle ecclésiastique au bénéfice de Porion :

« Nous sommes informés que vous vous proposiez de faire faire jeudi prochain, douze de ce mois, la première communion aux enfants et notamment aux jeunes garçons, que vous deviez même l'annoncer de main, dimanche, en chaire à la messe paroissiale. L'intention de M. Porion évêque de notre département étant que la première communion soit retardée, sans en avoir désigné l'époque, nous vous prions, Monsieur, de vous conformer aux désirs de ce prélat, en vous abstenant de toute formalité pour cette cérémonie. « Nous savons, à n'en pas douter, que plusieurs membres devotre clergé, cédant à l'animosité que leur inspire la nouvelle Constitution, se permettent, non seulement des discours et des propos déplacés dans la bouche d'un ecclésiastique, mais profitent de la circonstance de la première communion, pour inspirer à ces jeunes pénitents des deux sexes des sentiments qui tendent à former des mauvais citoyens et à déprimer notre sainte religion. Nous vous prions de les prévenir que nous les connaissons tous, que nous avons les yeux ouverts sur eux, que toutes leurs démarches nous sont connues, qu'elles sont blâmables et que si elles continuent, nous ne pourrons nous empêcher de prendre les précautions nécessaires pour le maintien du bon ordre qui nous est confié. »
Source : p. 223, Deramecourt, op. cité
On note que Porion a parfaitement compris que la pratique d'une première communion dans un jeune âge est une assurance d'une foi catholique profonde. Il a donc décidé qu'il fallait au contraire qu'elle soit aussi tardive que possible, notamment pour permettre que l'enfant ne la fasse jamais, se lassant des préparatifs tâtillons et indéfinis, des difficultés sans nombre pour y parvenir.

Dans la lettre au curé réfractaire de Calais, la municipalité pose aussi un double grief menaçant, mais très clair : "les discours déplacés et ... la circonstance de la première communion tendent à former de mauvais citoyens et ... à déprimer notre sainte religion". L'incrimination du curé Chavain est des plus imprécises. Mais on connaît trop bien ce genre d'arguments. Notamment l'expression de la municipalité de Calais "déprimer notre sainte religion" souligne la critique toujours faite de détourner les jeunes communiants des réalités sociales en leur faisant "des discours déplacés" sur la réalité eucharistique.

Le 25 avril 1791, Porion écrit à ses administrés du Pas-de-Calais pour leur annoncer que le temps pascal sera différé jusqu'à la Pentecôte. Pour lui, Jésus-Christ est "un Dieu de paix et de charité". La raison de Porion ? Les fidèles risquent de ne pas pouvoir se confesser à temps à cause "des circonstances". Ces circonstances proviennent du fait que l'Eglise constitutionnel manquait terriblement de confesseur et la vérité que les fidèles refusaient majoritairement de se confesser aux prêtres assermentés.

Un ex-chanoine, Turlure, écrivait un journal, L'Ami de la constitution. Le 10 mai 1791, il se charge de faire le ridicule panégéryque constitutionnel de Porion :

« M. Porion fait ici le plus grand bien, nul ne méritait mieux que lui d'être élevé à l'épiscopat. Aussi le surnomme-t-on le sauveur du département. Ce n'est pas qu'il ait pu convertir nos curés de ville, ils sont trop entêtés, mais il n'en a pas été de même de ceux des villages, ils commencent à revenir de leur erreur.

« Autant le peuple a conçu de mépris pour M. Chalabre, autant il témoigne d'attachement pour M. Porion.

Source; p. 243, Deramecourt, op. cité.
Cet extrait montre à l'envie que Porion s'était doté d'une véritable organisation propageant une religion nouvelle construite autour de la Constitution civile du Clergé. Cette propagation se basait sur l'entente avec les Montagnards comme Le Bon et Robespierre, et avec le républicanisme le plus toxique. Ici, Porion a mis en place avec ses affidés, un ex-chanoine Turlure, des moyens pour diriger l'opinion publique.

L'affaire de l'interdiction des messes conventuelles

Le 3 septembre 1791, Porion et ses deux vicaires épiscopaux Spitallier et Badollier, signent une pétition avec plus de deux cent signatures exigeant du district d'Arras la fermeture des églises du clergé régulier. Les signataires sont des maires et des curés constitutionnels (Source p. 267, Deramecourt, op. cité).

Les attaques du clergé séculier contre les messes des ordres religieux sont très anciennes. Avant la Révolution, déjà, les prêtres séculiers se plaignaient qu'un certain nombre de fidèles préféraient pour diverses raisons qu'il n'est pas le lieu de détailler ici les offices monastiques aux leurs. Il en résultait des conflits, souvent devant la justice locale. Cette querelle prend ici une autre tournure. En effet, il s'agit ici d'une plainte conjointe des municipaux et du clergé séculier, mais constitutionnel. Il est clair que la simple poursuite d'une concurrence mal ressentie est très loin de l'intention de Porion. Porion a simplement constaté que les couvents ne sont pas favorables à la Constitution civile du clergé. Il sait aussi que leur avenir est menacé à cause des voeux monastiques contre lesquels Porion et ses affidés Oratoriens, un ordre sans voeu ..., ont déjà tracé la stratégie de lutte.

Dans sa lutte contre les ordres religieux, Porion est sans aucun scrupule. Il demande froidement :

qu'il n'est pas moins instant que les églises des couvents d'hommes et de femmes soient fermés sans exception, tant dans les villes que dans les campagnes ; qu'ils prient le directoire d'informer sur le champ l'Assemblée nationale de ce voeu et d'exécuter provisoirement l'arrêté demandé ...
Source : p. 269, Deramecourt, op. cité.
Le directoire du département, après avoir obéi à la pétititon de Porion, édicte ensuite une solution à la "Salomon". Une requête de légiférer est envoyée à l'Assemblée nationale et, le 15 septembre 1791, il est décidé dans le département que les messes conventuelles sont seules autorisées et que les portes des couvents seront fermées après.

Le 17 septembre 1791, exaspéré, Porion suscite une nouvelle pétition encore plus pressante que la première qui commence par ces mots lourds de menaces révolutionnaires :

« Les vrais citoyens de la ville d'Arras n'ont pu voir avec les plus vives alarmes votre arrêté du 15 du présent qui permet aux maisons religieuses de faire publiquement leurs offices, tandis que vous aviez ordonné auparavant la fermeture de leurs églises.
Source : p. 269, Deramecourt, op. cité
Porion attaque dans sa seconde pétition les auteurs de l'arrêté autorisant les messes conventuelles. Il dénonce leurs "coupables intentions" contre la Constitution civile du clergé. Menaçant les autorités d'une émeute républicaine et patriotique, il propose au Directoire que seuls des prêtres assermentés puissent desservir les édifices conventuels. C'est habile.

Pourtant, le Directoire, moins "républicain" encore que Porion l'incriminait, maintient son arrêté. L'orage préparé par Porion couve alors quelque temps.

Les réactions des ordres religieux aux menées de Porion

Les réactions des couvents à l'élection de Porion ne furent en effet pas favorables. Les Dominicains de Saint-Omer refusèrent qu'il se joigne à eux à la procession des Rogations et de lui rendre hommage. Alertés par Porion et ses vicaires, les jacobins envoyèrent des émeutiers les molester et l'Administration de Saint-Omer ordonna la fermeture de leur église.

Le jour de l'Ascension de 1792, les religieuses urbanistes refusèrent de recevoir Porion dans leur couvent qui fut, en représailles, pillé le lendemain. L'Administration leur ordonna de se disperser et les assigna à résidence chez leurs parents. Il existe un grand nombre d'autres exemples de ces oppositions du clergé régulier contre la Constitution Civile du Clergé. Il ne faut pas cependant en tirer de fausse conclusion. Il existe beaucoup de moines parmi le personnel révolutionnaire.

Il existe de nombreux autres exemples.

Les difficultés financières de Porion

Mais les difficultés de Porion ne se limitaient pas aux rebuffades des catholiques, prêtres séculiers réfractaires, prêtres réguliers, fidèles. L'administration républicaine ne cessait de pourchasser Porion et son administration débile de ses avanies. Porion reçut l'ordre de "dégrader" le titre de la cathédrale de Sait-Omer parce que "le principe républicain d'égalité exigeait que tous soient égaux" et que la cathédrale serait simplement la paroisse de Saint-Omer. L'évêque devenait ainsi un curé comme les autres curés.

Porion et ses affidés tentèrent d'obtenir des subsides prévus par la Constitution civile du clergé pour maintenir l'église de Sainte-Radegonde. L'administration refusa et Porion dut ordonner la vente de l'église qui fut peu après utilisée comme halle aux grains, le 26 octobre 1792.

Le curé constitutionnel Michaud, qui desservait la paroisse de Saint-Bertin, avait des vues liturgiques très en avance sur son temps ... Il trouvait que dans l'abbatiale de Saint-Bertin, le jubé, merveille de sculpture, gênait le spectacle donné par le prêtre aux fidèles. Le jubé fut donc abattu pour permettre aux paroissiens de participer à la messe. Les municipaux de Saint-Omer appuyèrent ce souhait du curé Michaud et ils envoyèrent aux paroissiens une curieuse proclamation qui nous montre que le "modernisme" dans l'Eglise était très ancien :

« Les habitants des faubourgs, disent-ils, verraient subsister avec peine le jubé qui sépare la grande nef de l'église de St-Bertin et qui les empêche d'apercevoir le prêtre à l'autel. Il ne faudrait pas davantage pour regretter infiniment leurs anciennes paroisses ou pour les déterminer à commettre une voie de fait ; nous pensons d'ailleurs, Messieurs, que cet édifice est inutile, on nous a assuré qu'une adjudication à la charge de démolir produirait peu et que la démolition se ferait lentement, il serait plus court d'y employer nos ouvriers de commune, ce qui mettrait les choses en bon état pour les fêtes de la Pentecôte. Delattre, aîné; Rose, maire, De Cardevacque. »
Source : p. 208, Deramecourt, op. cité

On remarque ici que le clergé constitutionnel fut en réalité à l'initiative des jacobins dans la destruction des églises. Ils y étaient poussés par deux motifs :

  • le besoin d'argent et le manque de desservants qui contraignaient à la vente d'églises inutiles ; et
  • des impératifs de nouvelles liturgies sur lequelles nous disposons de fort peu d'informations.

La lutte de Porion contre le clergé réfractaire

Le clergé d'Arras ne fut pas du tout jureur. Il est étrange que ce clergé résista aux pressions les plus variées provenant tant des autorités révolutionnaires que de leurs nervis religieux. Beaucoup de ceux qui "jurèrent", firent des formules restrictives ou même se rétractèrent ultérieurement. Ainsi, on cite :

"Le curé de Tingry et Noyelles, Dinoir, passe pour avoir prêté un serment fort restrictif, de même que le curé de Fruges, Dutertre, qui a juré de faire profession de la foi catholique, apostolique et romaine, pour la défense de laquelle il est prêt à verser son sang. Jean-Baptiste Cauwet, curé de Fressin, jura aussi avec les plus grandes réserves, et le curé de Goupelle-Vieille, Théret, qui passait pour jureur, dénoncé plus tard à Porion, dont il ne lisait pas les mandements, fut mis en demeure de s'expliquer par oui et par non et remplacé."
Source : p. 122, Deramecourt, op. cité
Ainsi, Porion prêta évidemment son concours aux pressions pour faire "jurer" le clergé catholique qu'il pensait sous son autorité. L'Histoire montre à l'évidence que malgré le risque de mort, beaucoup résistèrent. Ils furent soutenus par les fidèles qui payèrent un lourd tribut dans la persécution de Le Bon qui faisait exécuter ceux et celles qui aidaient ou assistaient aux messes des réfractaires. Il est clair que Porion était d'entente avec Le Bon sur cette question l'un travaillant pour l'autre.

Le 12 février 1792, la municipalité de Nortkerque près de Saint-Omer, dénonce la conduite de son curé constitutionnel, Duhamel. Duhamel a refusé de lire en chaire le mandement de Carême de son évêque Porion et à la place, il a lu une lettre de l'évêque de Chalabre, émigré. Puis, comme un municipal voulait lire le mandement de Porion en chaire, Duhamel et son vicaire, Gagneur, sont sortis. Le curé et son vicaire sont contraints de renouveller le serment de fidélit à la Constitution civile du clergé. Mais, les persécutions commencent pour eux. La municipalité de Nortkerque les considérant rebelles à l'évêque Porion, émet un arrêté enjoignant Porion de limoger Duhamel et Gagneur, Ce que fit Porion.

Porion, promoteur de Daunou et de Lebon

On note que Porion a tenté d'emporter l'accord de l'Oratorien Daunou pour qu'il devienne son vicaire épiscopal. Daunou avait lutté de toutes ses forces pour entraîner l'adhésion du clergé d'Arras à la Constitution civile du Clergé. Il refusa l'offre de Porion et parti à Paris où il deviendra directeur du séminaire diocésain de Paris avant de devenir Conventionnel pour le Département du Pas-de-Calais. Daunou siègera au centre aux côtés de Sieyès, et non pas dans la Montagne à laquelle appartenait Le Bon. Daunou se déprêtrisera. Il fera ensuite une carrière de haut fonctionnaire de l'Empire. Son adaptatbilité à tous les régimes continuera à démontrer sa souplesse. Il terminera sa carrière député à la Chambre, puis Pair de France sous la Restauration (Deramecourt, p. 85, op. cité).

La réorganisation du diocèse doit à la fois contenter le district du Pas-de-Calais et s'adapter au manque de prêtres assermentés. En effet, le clergé d'Arras a massivement refusé de prêter le serment ou alors, avec de telles réserves que beaucoup de prêtres jureurs ne sont pas tenus pour sûrs par Porion. Ainsi, les paroisses de la ville d'Arras seront recomposées par Spitallier. Le district d'Arras se trouva réduit à 42 cures avec une moyenne de 1.200 à 1.500 âmes et un ou deux vicaires dans chaque paroisse pour les succursales.

Porion était tellement à cours de prêtres, qu'il a aussi présenté sans son accord Joseph Le Bon comme curé constitutionnnel de Neuville, petite commune à quelques kilomètres d'Arras. Comme personne ne voulait être élu, Le Bon est élu en son absence par 36 électeurs, le 7 juin 1791. Il accepte la place par une lettre du 22 juillet 1791. La place comportait un traitement de 1850 livres mensuels, ce qui était alors particulièrement confortable. On note que Le Bon était déjà curé constitutionnel à Ciel dans la "banlieue" de Beaune. Il accepta d'ailleurs plus tard de cumuler avec un poste de vicaire constitutionnel d'une paroisse d'Arras (A.J. Paris, p. 18, op. cité). On note ici que Porion et son équipe n'ont bien entendu pas été installés par Le Bon. C'est eux qui ont fait entrer Le Bon, parce qu'ils le savaient utile à leur plan de réorganisation de l'Eglise en symbiose avec la République, pas encore proclamée. Rappellons nous que Le Bon avait été élève sinon de Porion, du moins du Collège d'Arras lorsque Porion en était Préfet.

L'idéologie de Porion

Lorsque les divers curés furent tous "élus", une cérémonie présidée par Porion eu lieu à la cathédrale d'Arras, et Porion prononça un discours dont voici l'intéressante teneur.

« Messieurs,

je ne puis que vous féliciter de la célérité que vous avez mise dans vos élections. Lorsque le mal est pressant, le remède doit être prompt. Assez et trop longtemps la religion a eu à souffrir de l'obstination de nos frères égarés, et il eût été à désirer, sans doute, qu'on se fût occupé plus tôt du travail important que vous venez de consommer; on aurait épargné par là bien des scandales dont nous avons été les témoins, bien des plaies faites à l'Église, et qui peut être ne sont pas prêtes à se fermer.

Ce qui me flatte singulièrement, en ma qualité de premier pasteur, c'est que, malgré le grand nombre des nominations que vous aviez à faire , vous n'en avez fait que de bonnes ; et j'ai cette douce persuasion qu'il n'y a pas un seul des ecclésiastiques que vous avez honorés de votre choix, qui ne s'empresse de justifier la bonne opinion que vous avez conçue de lui. Oui, Messieurs, tous ceux que vous avez élus, se feront un devoir de travailler au salut des âmes qui viennent de leur être confiées ; ils y coopéreront tout à la fois par la régularité de leurs moeurs, et par la pureté de leurs instructions. Vertueux par principes, ils sentiront encore la nécessité de l'être par la circonstance du temps où nous vivons.

En effet, Messieurs, nous pouvons dire que c'est surtout à présent que le monde a les yeux ouverts sur nous, et que nous devons nous répéter les uns aux autres ces belles paroles de saint Paul aux Éphésiens ; « Ayez soin de vous conduire devant les peuples d'une manière digne de la sainteté de votre minisitère et de là gravité de votre vocation : Viâete itaque, fratres, quomodo caute ambuletis, non quaai insipientes, sed ut iapientes, quoniam dies mali sunt. » La réserve et la circonspection ne sauraient être portées trop loin, et vous en comprenez la raison, vous tous, mes chers coopérateurs.

Ah! si de tous temps nous avons été exposés à la censure, comment pourrions-nous y échapper dans ce moment critique, où il y a des mécontents sans nombre qui nous imputent tous les maux qui leur arrivent, quoiqu'ils ne doivent s'en prendre qu'à eux-mêmes? Voyez, diraient-ils, à la moindre faute que nous aurions le malheur de commettre, voyez si c'est à tort que nous avions annoncé que la religion était perdue ; examinez la conduite de vos nouveaux pasteurs : ceux qui devraient être vos guides ne sont plus pour vous que des pierres de scandale, et sont devenus eux-mêmes le déshonneur et l'opprobre de l'Église de Jésus-Christ, Elles sont maintenant, ajouterait-on, elles sont réduites au silence les voix qui doivent vous rappeler à vos devoirs; il n'est plus de médiateurs pour vous, puisque les ministres qu'on a désignés pour vous réconcilier avec Dieu et apaiser sa justice, sont les premiers à l'irriter.

Tels seraient, n'en doutez pas, Messieurs, les discours qu'on se permettrait, et qui seraient recueillis avec la plus grande avidité. Ah! je vous en conjure, prenons bien garde d'y donner lieu. Evitons, s'il se peut, jusqu'à la malignité des soupçons. Qu'une piété soutenue, qu'une décence vraiment sacerdotale, qu'une modestie exemplaire, qu'une vie édifiante nous distingue aux yeux du peuple et annonce dans tout mon diocèse, que le sel de la terre ne s'est point affadi, que les lampes d'Israël ne sont point éteintes; mais qu'elles vont jeter un éclat plus brillant que jamais. »

Source : p. 187, Deramecourt, op. cité.
Dans ce drolatique discours, Porion dont on sait qu'il se révéla quelques mois plus tard absolument anti-religieux, se mêle :
  • de corriger les prêtres réfractaires ;
  • d'exhorter ses confrères à travailler au "salut des âmes", singeant de manière effrayante la phraséologie de ceux-là même qu'il va "corriger",

Mais, le diocèse du Pas-de-Calais manque cruellement de ressources financières. Le 22 juin 1792, Porion doit faire fermer le séminaire, quasiment déserté d'élèves et à bout de ressources.

Les élections à la Législative (du 26 août au 2 septembre 1791)

Nous sommes à l'époque de la fuite du Roi à Varenne. L'effervescence est, en province, à son comble selon les témoins. Les élections à la Législative dans le Département du Pas-de-Calais sont organisées par Porion lui-même. La chose est des plus étranges et n'a probablement jamais été soulignée. L'évêque constitutionnel n'avait aucun titre à les organiser. Il choisit de les tenir dans l'église Saint-Géry d'Arras. Il commença par célébrer une messe du Saint-Esprit et se fit élire président de l'Assemblée électorale. Son secrétaire élu fut Carnot jeune (p. 273, Deramecourt, op. cité).

Autre fait étrange, Porion fut élu président avec seulement 366 voix sur 648 votants tandis que le second en avait eu 564. La démocratie avec des curés a des raisons que la démocratie n'a pas ...

Porion fait élire les deux frères Carnot. Autre bizarrerie de la démocratie avec les curés constitutionnels : le secrétaire de l'assemblée électorale peut se présenter aux suffrages de l'assemblée ... Le président avait bien célébré une messe au ... Saint-Esprit.

Parmi les élus, on note l'ancien oratorien Le Gressier de Bellanoy. L'organisation mafieuse de Porion parvint à placer aussi dans l'administration municipale :

  • à Saint-Omer, le vicaire épiscopal Dupont, par 59 voix, et l'évêque Porion par 46,
  • à Boulogne, l'abbé Cléry et l'oratorien Cattaert.
Le "président" Porion conclut les élections des députés et des administrateurs du département par un discours d'enflure jacobine. En récompense, Robespierre, grand vainqueur des élections nationales, accepta de visiter le petit peuple d'Arras, le 5 octobre 1791 où une réception triomphale lui fut accordée. Selon Desessarts qui a écrit un ouvrage sur les crimes de Robespierre et de ses complices, en 1797, Robespierre resta à Arras pour organiser la répression jacobine autour de Le Bon et de Guffroy. Et d'un seul coup les choses changèrent.
Les élections de novembre 1791, que l'on peut appeler complémentaires, se firent d'après le même règlement que celles de juin, et avec un peu moins de solennité. Une messe les inaugurait et un Te Deum en annonçait la clôture. Nous devons pourtant constater que ni l'évêque ni les vicaires épiscopaux n'y prirent part.
Source : p. 284, Deramecourt, op. cité
Il semble donc que Robespierre fit éliminer Porion et son équipe de curés constitutionnels du jeu politique pour tout confier à Le Bon et Guffroy.

Le mandement de Carême de 1792

Porion publie le 24 janvier 1792 un Mandement de Carême :

L'instruction pastorale traite de la pénitence ; la première partie est consacrée à démontrer la nécessité de faire pénitence à l'approche du temps pascal ; la seconde renferme surtout une exhortation aux fidèles pour les mettre en garde contre les évêques exilés. A cette occasion, l'évêque Porion cherche, une fois encore, à prouver la validité de son élection et il termine par ces mots : « Pour nous, qui nous glorifions d'être bon Français, de vous tenir lieu de père, pour nous, intimement convaincu que la charité est la reine des vertus et la base de toute religion, nous prenons ici devant Dieu l'engagement solennel de ne vous prêcher jamais qu'obéissance et fidélité aux puissances qui nous gouvernent, de mourir plutôt que de quitter nos ouailles par la crainte d'aucun péril, et de vous inspirer sans cesse l'amour de la paix, de l'union, de la concorde et de toutes les qualités civiques qui seules peuvent procurer la tranquillité générale et notre bonheur individuel.

« Donné à St-Omer, de l'avis de notre conseil, pour être lu, publié et affiché dans toutes les églises paroissiales et succursales de notre diocèse, le 24 janvier 1792. — P. J. Porion, évêque du département du Pas-de-Calais. »

Source : p. 349, Deramecourt, op. cité
Porion insiste sur la charité, la meilleure vertu pour exciter l'obéissance docile, qu'il exige d'ailleurs de ses fidèles à l'égard des Jacobins. La religion de Porion est strictement identique à celle de Robespierre, son élève : inspirer sans cesse l'amour. L'amour de quoi ? de n'importe quoi : de la paix, de l'union, de la concorde et de toutes les qualités civiques, nous disent Porion et ses modernes successeurs.

Dans une brochure, éditée le 16 février 1792, trois semaines après la publication du Mandement de Porion, brochure qui fut saisie chez un fidèle catholique qui fut exécuté, on a trouvé une réfutation du Mandement de Porion par un auteur se disant prêtre catholique et se dénommer "Aletophile". Il écrit :

« Vous vous annoncez comme l'envoyé de Dieu. Où sont vos lettres de créance ? La seule pièce que vous puissiez m'offrir c'est un procès-verbal d'assemblée électorale ; c'est une mission toute humaine. « Vous êtes de la même fabrique qu'Expilly, à qui Pie VI disait le 13 avril 1791 : Vos misero infelix iste. Vous êtes un schismatique. Qu'avez-vous répondu à la dernière instruction de Mgr l'évêque de Boulogne sur l'obligation de s'attacher aux légitimes pasteurs? Vous êtes resté muet.

« A défaut de raison, comme tous les sectaires, vous avez recours à la calomnie, ce vice des âmes basses.

« Vous n'êtes pas un pasteur mais un meurtrier.

Source : p. 351, Deramecourt, op. cité
"Aletophile" a une expression vigoureuse.

Le 3 mars 1792, Porion répond aux plaintes nombreuses des Districts qu'ils ne parviennent plus à nommer de prêtres constitutionnels dans les paroisses. Porion avoue :

« Les circonstances m'ont engagé jusqu'ici à multiplier mes ordinations, mais je ne veux le faire qu'en raison des véritables besoins de l'Église qu'il ne m'a pas encore été possible de connaître par moi-même. Veuillez, Messieurs, me faire passer l'état exact des remplacements à faire dans votre district, tant aux cures qu'aux vicariats : je vous saurai gré d'une attention qui intéresse et la chose publique et la religion. P.-J. Porion, évêque du Pas-de-Calais. »
Source : p. 372 Deramecourt, op. cité
Porion est incapable de faire face à la pénurie de prêtres. Et il est "conscient" de l'importance pour la République, que la religion soit florissante. Toute la politique de la Constitution civile du clergé, toute la religion de la Convention tendent à un seul point d'oppression parfaite : le point de convergence d'une idéologie politique et d'une parodie de religion pour un crime parfait contre l'humanité.

Le 8 avril 1792, Porion dénonce aux administrateurs du département M. Théret, curé de Coupelle-Vieille, coupable de calomnier les curés constitutionnels. (p. 370, Deramecourt, op. cité).

La Convention venait de promulguer une loi du 23 avril 1793 qui décrète que « tous les ecclésiastiques réguliers, séculiers, frères convers et lais, qui n'ont pas prêté le serment de maintenir la liberté et l'égalité, conformément à la loi du 15 août 1792, seront embarqués et transférés sans délai à la Guyane française. ». Lors d'une assemblée électorale tenue à Saint-Bertin de Saint-Omer, Porion fait exécuter la Marseillaise avec accompagnement d'orgue. Il prononce ensuite le serment liberté-égalité :

« Je fais le serment d'abhorrer la royauté, d'être fidèle républicain, de maintenir la liberté et l'égalité ou de mourir en les défendant. »
Source : p. 407, Deramecourt, op. cité
On note que Porion ne célèbre plus de messe du Saint-Esprit, ni ne chante de Te Deum. On chante la Marseillaise sans Porion. Et il doit prêter, un nouvelle fois et en accusé, le serment de la Constitution civile du clergé.

En janvier 1793, Porion publie un Bref dans lequel il insiste sur l'importance pour les curés constitutionnels de continuer le service des registres de baptêmes et de mariages. Il est immédiatement dénoncé par le Directoire de Saint-Omer auprès du Comité de sûreté de la Convention comme contrevenant à la loi du 20 Septembre 1792 qui confie le monopole de l'état-civil aux communes.

Les actions de Porion contre le célibat ecclésiastique

Porion ordonne prêtre un père de famille le 2 juin 1793. Nous avons quelques indications que cet homme était le greffier de la commune de Neuville, dont Le Bon avait été curé et Porion aurait nommé cet homme curé constitutionnel de Neuville.

Porion célèbre religieusement le mariage du curé Faudier, de Calais, le 2 juin 1793. L'ordination, puis sa nomination comme curé constitutionnel de Neuville, d'un homme marié, puis la célébration "religieuse" du mariage d'un prêtre constitutionnel, faisait évidemment partie d'un plan concerté avec les "jureurs". Le Bon saisissant l'occasion, fait passer le 26 juin 1793 un arrêté par le District d'Arras en écrivant un ordre impératif :

« Considérant que l'Auteur de la nature n'a rien fait d'inutile ; que les hommes naissent pour se reproduire ; que les prêtres de toute espèce de sectes sont des hommes, et que par conséquent ils doivent travailler à se reproduire comme les autres ;

« Considérant que, dans l'état de société, le bon ordre et l'intérêt des enfants exigent que leurs pères soient légalement connus, et que le mariage est le plus sûr moyen d'obtenir cette reconnaissance légale :

« Déclare d'abord à l'unanimité que le citoyen Faudier, curé à Calais, n'a fait, en se mariant, que le devoir d'un honnête citoyen, et que l'évêque, s'il l'eût improuvé, aurait dû être poursuivi comme l'ennemi du genre humain.

« Mais considérant que, pendant le sommeil de la raison, des milliers de menteurs en soutane ont bouleversé toutes les idées par leurs discours charlataniques ; qu'au nom du ciel qu'ils outrageaient, ils n'ont pas craint d'appeler bien ce qui était mal, et mal ce qui était bien; qu'ils sont parvenus à masquer tellement leurs abominables leçons de révolte contre les lois de la nature et contre celles de la société qu'il faut aujourd'hui un courage supérieur pour oser suivre les unes ou les autres, ou même pour approuver ceux qui les suivent:

« L'assemblée, ouï le procureur général syndic, déclare applaudir unanimement à la conduite de l'évêque Porion, au mariage du citoyen Faudier, curé à Calais, ainsi qu'à celui des prêtres de ce département qui auraient déjà pris le même parti ;

« Arrête que la présente déclaration sera imprimée et adressée à la Convention nationale, au bureau central des représentants du peuple à Arras, aux huit districts, et à toutes les communes du département ;

« Qu'une expédition particulière sera envoyée à l'évêque Porion, à tous ceux de ses coopérateurs mariés et à leurs épouses, auquel effet ledit évêque est invité à donner la liste de leurs noms et domiciles ;

« Arrête en outre, sur la motion incidente d'un membre, que l'administration sollicitera une loi qui comprenne parmi les zélés défenseurs de la patrie ceux qui, par leurs ouvrages et surtout par leur conduite, auront contribué à anéantir les plus cruels ennemis des nations, savoir : la superstition et les préjugés.

« Quant à la demande formée par la société populaire de Calais, l'Assemblée, en rendant justice aux principes qui animent cette société, déclare attendre tout du temps et des lumières.

Source : p. 69, A.J. Paris, op. cité
Cet arrêté ne promulgue pas une interdiction du célibat des prêtres. Il le déclare un "crime contre la Nature". Incidemment, on note que l'arrêté de Joseph Le Bon fait justice de l'affirmation erronnée de "sociologues des religions" acharnés contre l'Eglise fidèle, comme Frédéric Lenoir, qui laissent croire que le port de la soutane est relativement récent, insinuant que Léon XIII aurait été photographié en redingote ... On voit ici que pour stigmatiser l'Eglise fidèle, Le Bon décrit "des milliers de menteurs en soutanes". De plus, Léon XIII a été photographié en redingote lors des terribles persécutions de la République garibaldienne.

Il est clair que l'arrêté de Le Bon était destiné à pourvoir les tribunaux révolutionnaires d'un motif de condamnation supplémentaire contre les prêtres réfractaires, ou même contre les "constitutionnels" encore trop tièdes ou "empêtrés des idées du temps de la superstition", comme disaient Le Bon et ses maîtres. L'arrêté présente aussi une injonction à laquelle les députés ne pourront pas se soustraire au risque de diriger contre eux les foudres des sociétés populaires. Cette instruction leur enjoint de voter une loi de prohibition du célibat ecclésiastique.

Enfin, le lien entre les menées de Joseph Le Bon et l'action constante de Porion ressort clairement du texte même de l'arrêté. Le Bon n'était pas un "fou sanguinaire" isolé, ou aux mains de quelques "bandits aux mains ensanglantées". Il était membre d'une entente patiemment formée parmi les Oratoriens d'Arras. Porion était probablement l'un des maîtres de cette entente.

Porion était tellement lié aux manoeuvres de Le Bon qu'il crut de son devoir de répondre à l'arrêté de Le Bon dont une expédition aurait du lui être remise. Il écrit :

« Saint-Omer, 12 juillet 1793, 2° de la République.

Citoyens administrateurs, je n'ai eu connaissance qu'aujourd'hui et par voie indirecte, de votre arrêté du 26 juin, relatif au mariage du curé de Calais, quoi que par une disposition de cet arrêté, il ait dû m'en être fait une expédition particulière, je ne l'ai cependant pas reçu d'une manière officielle. Cela m'a privé, citoyens administrateurs, du plaisir de vous remercier plus tôt de la mention honorable que vous avez bien voulu faire de moi.

La conduite que j'ai tenue, par rapport au citoyen Faudier, ne m'a coûté qu'un léger déplacement dont on avait cherché à me détourner par des menaces anonymes, mais qui m'a valu des bénédictions sans nombre. J'ai pour principe qu'aucune autorité sur la terre ne peut prescrire le célibat à un individu quelconque et que tous les hommes sont appelés au mariage, non seulement par la loi naturelle, mais encore par la loi divine. Il me semble, d'ailleurs, qu'il est infiniment à désirer que les prêtres se marient, surtout pour le plus grand avantage de la République qui, sans doute, leur deviendra plus chère à mesure que se multiplieront les liens qui les y attachent.

Oui, citoyens, je suis très convaincu que la horde ecclésiastique ne serait pas émigrée par essaim et ne tenterait pas aujourd'hui d'égorger la France, le crucifix à la main, si les doux noms de pères et d'époux n'eussent été injustement déclarés incompatibles avec le sacerdoce.

Signé: Porion, évêque du Pas-de-Calais.»

Source : p. 439, Deramecourt, op. cité
Porion était si fier de ses menées contre le célibat ecclésiastique qu'il fournit une annexe contenant les noms des prêtres assermentés qui avaient contracté mariage. Cette liste est encore bien brève :
  • Bernet, viciaire à Hodelinghem, district de Calais ;
  • Laisné, vicaire épiscopal à St-Omer ;
  • Delaleu, prêtre administrateur à Rapatime ;
  • Saupique, à St-Omer ;
  • Vasseur, maintenant aumônier;
  • Le Bon, à la Convention nationale ;
  • Faudier, à Calais ;
  • Dewile, vicaire à Ardréa, ordonné étant marié.

Mais Porion est de plus contesté à Saint-Omer. Le 6 mai 1793, il est accusé de tenir des registres d'état-civil en violation de la loi du 22 janvier 1793. Il reçoit l'ordre d'annuler son instruction et de faire brûler tous ses registres.

L'affaire Omoran

L'affaire Omoran ne nous apprend pas grand chose sur Porion lui-même, mais plutôt sur l'organisation mafieuse, centrée sur Le Bon, et montée par les Oratoriens séides de la République. Omoran était un général de l'armée du Nord que Le Bon fit arrêter pour modérantisme et transférer à Paris où il fut guillotiné le 9 mars 1793, par Fouquier-Tinville, malgré les efforts des frères Carnot pour le sauver.

Or, Omoran habitait Sait-Omer dans le ressort de Le Bon qui avait nommé l'ancien vicaire général de Porion, l'Oratorien Laisné, déprétrisé, comme commissaire du district de Saint-Omer. Lors d'une levée de scellés chez Omoran, Laisné vola de manière éhontée la veuve du général. Sur sa plainte, Laisné fut renvoyé au tribunal d'Arras par le jury d'accusation et Madame Omoran appelée comme témoin.

Ignorant les liens entre Le Bon et Laisné, Mme Ormoran imagina que une rencontre avec Le Bon arrangerait ses affaires. Quand elle parvint chez Le Bon celui-ci entra dans une fureur indescriptible et la fit mener au comité de district avec un billet menaçant :

"Le comité de surveillance dira pourquoi la femme du guillotiné Omoran n'est point en arrestation."
Source : p. 270, A.J. Paris, op. cité

Proprement paniqué, le comité de surveillance composé d'affidés de Le Bon, renvoie la "femme Omoran" avec un garde porteur d'une lettre expliquant pourquoi le comité était contraint de laisser libre la "femme Omoran". Revoyant la figure de celle qu'il pensait avoir définitivement effacée de la Terre, Le Bon entra dans une colère terrible et renvoya Mme Omoran avec son garde. Mme Omoran fut emprisonnée sur le champ.

Il est parfaitement clair que Le Bon était au courant des malversations de Laisné qu'il avait probablement nommé dans ce sens. Il tentait par tout moyen de protéger Laisné dans son procès. Nous n'avons pas trouvé le résultat judiciaire au sujet de Laisné et de Mme Omoran. Nous avons d'ailleurs d'autres indications écoeurantes de la concussion de Le Bon. Il retenait en prison et à destination de l'échafaud les contribuables les mieux imposés, parce que leurs biens étaient saisis au "bénéfice" de la République. Tout porte à croire qu'à Arras, comme partout en France, ces spoliations des "ennemis de la République" bénéficiaient aussi aux "incorruptibles amis de la République". Et Porion devait nécessairement participer au système ayant nommé Le Bon curé de Neuville et Laisné son grand vicaire.

La fin de l'évêque Porion

On note que la fin de Porion est littéralement signalée par l'envoi en mission de Le Bon, 29 octobre 1793. Et le 2 frimaire an II (le 22 novembre 1793), Porion remet ses lettres de prêtrise et le procès-verbal de l'assemblée électorale de sa nomination comme évêque constitutionnel au district de Saint-Omer en signe de déprêtrisation (Voir A.J. Paris, Note, p. 69, op. cité)

Selon Chavagnon et Saint-Yves, Porion se maria. En récompense, il fut nommé administrateur municipal de Saint-Omer le 12 décembre 1797. Il en démissionna le 23 février 1798. On note sa mort le 20 mars 1830 sans que l'on sache rien de sa vie de 1798 à 1830 ( Source p. 223, J. Chavanon et G. Saint-Yves, op. cité).

En 1797, Asselin, curé du Saint-Sépulcre à Saint-Omer,fut élu évêque constitutionnel. Il fut sacré à Paris le 8 octobre. Il n'y eut donc pas d'"évêque constitutionel" de novembre 1793 à octobre 1797. Asselin faisait ses courses monté sur un âne, pour se distinguer des fastueux évêques de l'ancien régime. Cette manière patriarcale de voyager lui valut le surnom d' « évêque à baudet ». Il était du même tonneau que Porion.

L'oeuvre de Porion est dérisoire et terrible. Il protégea de son ombre les terribles manoeuvres anti-chrétiennes d'un groupe nombreux d'Oratoriens, liés au Collège d'Arras. Cette fédération semble avoir tenté de promouvoir la puissance politique de ce groupe en se fondant sur la complicité d'une perversion du christianisme et d'une utopie tyrannique. Par sa recontre avec Robespierre, cette ignoble fédération débouche sur Joseph Le Bon.

L'"épiscopat" scandaleux de Porion fut le masque et le prélude de la persécution anticatholique la plus terrible. Y succombèrent pour leur gloire beaucoup de prêtres fidèles à la Foi et d'innombrables fidèles. L'histoire de Porion illustre une tendance lourde que l'Eglise a refusé d'analyser et contre laquelle elle est toujours incapable de se défendre puisqu'elle refuse de la nommer et qu'elle l'identifie de manière inexacte.

L'idéologie de Porion a été réfutée notamment par l'Abbé Proyart dans un opuscule qu'il avait laissé à sa famille en partant en émigration. Le P. Proyart était un prêtre du diocèse d'Arras. Son texte est cité et analysé par Deramecourt (voir p. 239, Deramecourt, op. cité). Nous ne pensons pas utile de pousser ici l'analyse à laquelle nous renvoyons le lecteur concerné. Mais l'analyse de Proyart serait une base de départ utile de la critique de l'Histoire de l'Eglise.

Pie VI dans son bref Quod Aliquantum a exprimé une condamnation fortement motivée de la Constitution Civile du clergé. Mais, la qualifiant de novation, ce qu'elle n'était pas, Pie VI a ainsi liée la tradition de l'Eglise au régime monarchiste qui avait pourtant partie liée avec la "novation". Tout était mélangé et la condamnation papale devenait inaudible. Elle est aujourd'hui pratiquement oubliée.

C'est grand dommage.

Sources :