Les tristes illusions d'une enseignante
de philosophie Philippe Brindet 17 juillet 2008 |
Dans sa page de philosophie du 11 juillet 2008,
le Monde ouvrait ses colonnes à une enseignante de philosophie de
lycée. Dans un style effrayant, elle exprime la pensée la plus conforme au jacobinisme le plus radical, n'hésitant pas à enrôler les auteurs les plus éloignés de sa sphère pour son objectif unique d'éradication du catholicisme en France. A chaque ligne s'éructe sa haine du catholicisme. Il est effrayant de savoir que cette attitude est majoritaire chez les enseignants et qu'elle produit un formatage des esprits à la "laïcité républicaine", c'est-à-dire anti-catholique. Si encore s'exprimait une pensée, non pour protester seulement contre l'anti-catholicisme, comme dans ce papier, mais pour exposer un catholicisme vigoureux, il existerait une certaine chance pour que les lycéens puissent échapper aux torrents d'inepties dont leurs enseignants les abreuvent. L'utilisation paradoxale du penseur du germanisme le plus caricatural par les républicains est un paradoxe aussi étonnant que l'effarante révérence pour Céline des esthètes socialistes. Lorsque l'on lit Nietzsche, on comprend que l'illusion dérive d'une théorie du suicide, parce qu'elle est la réponse du surhomme au nihilisme. L'acte ultime du surhomme est réalisé par le suicide. La folie de Nietzche est le produit de son incapacité à mettre personnellement sa philosophie en pratique. Or, l'enseignante de philosophie confond l'illusion nietzchéenne qui est une pathologie du réalisme avec l'apparence qui est justement le premier choc de la conscience avec le réel. Soumise au verbiage du relativisme le plus obscur, l'enseignante de philosophie confond encore la volonté de vérité avec son désir. Comme si la vérité était un produit de la volonté alors que la volonté n'est qu'en acte. Seul pré-existe à l'acte le désir de l'acte, non comme excitation de l'affect, mais comme intuition de l'avenir. Chez Nietzsche la volonté de puissance n'est jamais que l'inversion de l'analyse aristotélicienne. Pour le Stagiryte, la puissance de l'acte est engendrée par la volonté du sujet. Chez Nietzsche, l'être est lui-même puissance, ou encore l'être est sa propre source de puissance, et l'acte n'est que le produit nécessaire, déterminé de cette volonté de puissance. Il ne faut donc pas confondre chez Nietzsche le désir avec la volonté, ni d'ailleurs appliquer la volonté qui est du domaine de l'action avec la vérité qui est du domaine de l'être. Ces pseudo-confusions de l'enseignante ne proviennent absolument pas d'une ignorance. Elles sont l'expression d'une volonté de tromper les lycéens, encore malléables. De même, contrairement à ce qu'affirme l'enseignante, l'illusion nietzschéenne n'est en rien illustrée par l'oeuvre d'art. Nietzsche a rejeté Wagner quand il s'est aperçu que son alliance avec l'oeuvre du Maître de Bayreuth lui interdisait de sortir du champ de l'art. Par bravade, par esprit de provocation, Nietzsche qui méprisait profondément les espagnolades napoléonides, a prétendu préférer Carmen de Bizet à toute l'oeuvre de Wagner. Plus encore, chez Nietzsche, il n'existe aucune volonté de vérité dans le surhomme. Il lui suffit de dominer son destin en s'y soumettant comme à un fatum. Or, la vérité n'est pas le produit de la volonté, parce que la critique rationnelle de l'apparence conduit l'individu à la connaissance de la vérité quand le refus nietzchéen de l'apparence le conduit à l'illusion comme matière à la volonté de puissance. Mais, alors quel peut être l'intérêt pour un enseignant de philosophie laïque d'enseigner la pensée de Nietzsche ? Il suffit de noter les expressions employées par l'enseignante dans son article pour comprendre le but exclusif de l'enseignement de la pensée distordante de Nietzsche : - Questionnement critique - dimension subversive - la plupart des humains préfèrent s'en tenir à leurs convictions, - se satisfaire des réponses rassurantes, - La figure du fanatique, laïc ou religieux, - la forme la plus dangereuse de l'illusion, celle qui n'a pas conscience d'elle-même - un être aux convictions dogmatiques - persuadé de détenir une vérité comme une marchandise dont il serait l'unique détenteur - il n'hésite pas à imposer aux autres ses convictions - la souffrance infligée ou subie au nom d'une croyance... Arrêtons là ce catalogue d'idées anti-catholiques, parfois honteusement masquées. Espérons que les lycéens de cette enseignante auront assez d'énergie vitale pour rejeter un enseignement aussi minable, masquant l'appel au suicide nietzschéen par l'invocation à l'autonomie individuelle, à laquelle les jeunes adultes se libérant de la tutelle familiale sont si sensibles, naturellement. - - -
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